Le droit de la propriété intellectuelle est inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme (art. 27 – 2) en ces termes : « Chacun a droit à la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production scientifique, littéraire ou artistique dont il est l’auteur. »
Là-dessus nous sommes tous d’accord. Encore faut-il s’y retrouver et comprendre comment pouvoir s’en prévaloir. On essaie de déblayer le terrain de la règlementation française en cinq parties ?
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1 – Qu’est-ce que la propriété intellectuelle ?
Le terme « propriété intellectuelle » (PI) désigne les œuvres de l’esprit : inventions, œuvres littéraires et artistiques, dessins et modèles, et enfin les emblèmes, noms et images, utilisés dans le commerce.
La propriété intellectuelle se décompose en :
- propriété industrielle, qui a pour objet la protection et la valorisation des inventions, des innovations et des créations, dans le domaine industriel. Elle protège par exemple les créations techniques, créations ornementales (motifs ou design) ou signes distinctifs (les marques, noms de domaine…). Cette protection s’acquiert uniquement par le dépôt d’une demande.
- propriété littéraire et artistique (parfois désignée par la notion de droit d’auteur) protège et valorise les écrits, slogans comprenant une portée créative, compositions musicales, scénographiques, visuelles, etc. Elle permet de faire valoir ses droits non seulement en tant que créateur mais aussi en tant que partie prenante. Cette protection est automatique, à condition que la création remplisse les critères d’éligibilité.
En France, les lois et règlements correspondants ont été regroupés en 1992 dans le code de la Propriété intellectuelle et la violation de ses dispositions peut être sanctionnée par trois ans de prison et 300.000 euros d’amende.
2 – À quoi sert la propriété intellectuelle ?
La PI a un double objectif : moral et économique. Elle garantit aux inventeurs une reconnaissance, mais leur permet aussi (et surtout) de pouvoir tirer des avantages économiques de leurs innovations ou créations artistiques.
En conciliant les intérêts des innovateurs et ceux des consommateurs, la raison d’être du droit de la propriété intellectuelle française est de préserver, et même favoriser un environnement propice à l’épanouissement de la créativité et de l’innovation.
Pourquoi devrions-nous y réfléchir ?
Qu’il s’agisse d’une innovation, d’une image, d’une création esthétique, d’un nom, d’une base line ou d’un logo, il convient toujours de se demander s’il serait opportun de protéger notre création d’une tentative de réappropriation.
La protection, bien que payante, apporte un certain nombre d’avantages : source de fierté pour nos équipes, elle enrichit le capital immatériel de l’entreprise, valorise nos créations auprès de nos partenaires commerciaux, accroît notre crédibilité et notre légitimité. Elle est aussi susceptible de faciliter la conquête d’autres marchés.
Rappelons en outre que nous évoluons désormais dans un monde totalement transparent. Nous sommes susceptibles à tout moment de nous faire ubériser, hacker et parfois… doubler ! La question de la protection de nos innovations se pose donc : certes la PI ne nous protègera pas de l’agilité d’une jeune start-up, mais au moins posera-t-elle des limites…
L’enveloppe Soleau à la rescousse
Dans le cas d’un conflit quant à l’antériorité d’une production, l’enveloppe Soleau est une première étape, simple et peu onéreuse qui permettra de faire valoir ses droits d’auteurs.
En quelques clics et moyennant 15 €, il est en effet possible de protéger et dater une idée non concrétisée :
- un procédé ou une méthode de fabrication,
- une idée de création (artistique ou non) : par exemple, une idée d’appli ou de logiciel.
Attention ! L’enveloppe Soleau n’est pas un titre de propriété industrielle ! Elle ne constitue qu’une première étape, lorsque vous êtes en phase de réflexion (début de projet, concept non abouti), afin de dater une idée et la garder au secret. Elle ne vous dispensera donc pas de déposer ensuite un brevet.
Dites-vous qu’il existe nécessairement un mode de protection adapté à votre situation, c’est d’ailleurs bien pour cela qu’il existe autant de formules ! L’Institut national de la propriété industrielle (INPI) est là pour vous aider à vous y retrouver : comment protéger quoi.
3 – La propriété industrielle, pour la protection des marques et des inventions
Le droit de la propriété industrielle protège les marques, les brevets, les dessins et les modèles, en conférant à son détenteur un titre de propriété.
Les demandes de protection doivent donc être déposées auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (seul organisme habilité en France) qui se charge de la réception des dépôts et de la délivrabilité des titres de propriété industrielle.
Le titre de propriété industrielle confère à l’heureux bénéficiaire un monopole d’exploitation, d’une durée de dix ans, renouvelable indéfiniment pour les marques, et de vingt ans (ou vingt-cinq ans) non renouvelable pour les brevets. Il existe plusieurs régimes de protections, mais nous ne vous en présenterons ici que deux (la marque et le brevet ; pour avoir une vue d’ensemble des dispositifs existants, c’est ici).
Qu’est-ce qu’une marque ?
Les marques sont des signes imaginés par les entreprises afin de permettre aux consommateurs d’identifier leur produit, mais aussi de distinguer ce dernier de ceux proposés par les concurrents.
Un dépôt de marque n’a pas vocation à protéger un nom de manière générale, mais un nom identifiant des produits et/ou des services : il faut donc commencer par identifier les produits et/ou services concernés par sa marque, puis les ordonner en fonction de la nomenclature internationale (on parle de classes).
Ce premier travail permet de procéder à « une recherche d’identité », afin de s’assurer qu’il n’existe pas de marque identique ou similaire (comprenez un nom de marque déposé dans la même classe).
Le formulaire de dépôt de marque (à transmettre à l’INPI) est payant (entre 200 et 250 euros) et doit être renouvelé tous les dix ans.
Qu’est-ce qu’un brevet ?
Un brevet est un titre de propriété intellectuelle d’un produit ou d’un procédé. Il donne à son propriétaire le monopole d’exploitation de l’invention brevetée, pour une durée déterminée. Personne d’autre ne peut exploiter l’invention pendant ce laps de temps, sauf autorisation/licence expressément accordée par l’inventeur.
Tout trait de génie ne peut toutefois pas être breveté. L’invention doit :
- présenter un caractère nouveau (il ne doit pas exister d’inventions similaires déjà utilisées),
- apporter une réponse technique à un problème technique,
- être le résultat d’une réflexion inventive,
- être susceptible d’application industrielle (l’invention doit pouvoir être fabriquée ou utilisée, eh oui !).
Les brillantes idées abstraites, théories scientifiques ou méthodes mathématiques ne sont pas brevetables : pour savoir ce qui est brevetable ou non.
Le formulaire de demande de brevet (à transmettre, là encore, à l’INPI) est payant (compter d’abord 36 + 520 pour le dépôt de dossier et la recherche d’antériorité ; puis 90 € si le brevet est accordé) et doit être renouvelé tous les vingt (ou vingt-cinq ans).
4 – La propriété littéraire et artistique, pour la protection des œuvres… littéraires et artistiques
La propriété littéraire et artistique se compose du droit d’auteur et des droits voisins.
Elle concerne les œuvres :
- littéraires : romans, essais, nouvelles, pièces de théâtre ou parole de chanson…,
- artistiques : peintures, dessins (au fait ! les dessins et modèles industriels peuvent eux aussi faire l’objet d’une protection au titre de la propriété littéraire et artistique), sculptures, chorégraphies, architecture, composition musicale, photographie…,
- audiovisuelles : films, documentaires, photographie…
En France, la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) sera votre interlocuteur en plus de l’INPI.
Le droit d’auteur
Le droit d’auteur est un droit qui permet à son titulaire de détenir la propriété exclusive de son œuvre. En France, toute création littéraire ou artistique, qu’elle soit publiée ou non, est de facto protégée au titre du droit d’auteur : aucune démarche particulière n’est requise (à un détail près : être le premier à en revendiquer la paternité).
En plus des créations littéraires ou artistiques, il protège les auteurs d’œuvres numériques (site internet, base de données…), de publicités, d’œuvres architecturales ou encore de cartes.
Le droit d’auteur recouvre :
- le droit moral, qui définit le « lien inaliénable, imprescriptible et perpétuel qui existe entre l’auteur et son œuvre ». Il permet de revendiquer la paternité de sa création et d’en contrôler la diffusion, les éventuelles demandes de modifications, ou encore d’imposer que son nom soit obligatoirement mentionné en cas de divulgation.
- les droits patrimoniaux, qui confèrent à l’auteur le monopole de l’exploitation économique sur son œuvre ! Ce dernier est alors seul habilité à accepter ou non l’utilisation commerciale (et en définir les conditions) de son œuvre. Il est aussi le bénéficiaire des droits d’auteur (ou royalties). Attention, les droits patrimoniaux ne sont pas perpétuels. Au-delà d’une certaine durée (70 ans à compter du décès de l’auteur en France), une œuvre entre dans le « domaine public » et peut être exploitée par tous sans demande d’autorisation préalable.
Attention, toutefois. Seules les œuvres remplissant les deux conditions suivantes sont couvertes par le droit d’auteur :
- elles doivent avoir un caractère « original ». Concrètement, un plagiat, une copie ou une œuvre dépourvue de fantaisie (ou fortement inspirée d’une autre) ne peuvent pas être protégés,
- elles doivent reposer sur un support matériel (un manuscrit, un enregistrement audio, un dessin…). Une idée ou un concept, même de nature littéraire ou artistique, et même énoncée devant témoins, ne suffisent pas. Autrement dit, si vous avez déclamé votre dernier poème en place publique… et que celui-ci a remporté un franc succès, n’allez pas penser que la paternité de votre œuvre vous est acquise !
Les droits voisins
Il s’agit des mêmes droits moraux et patrimoniaux que ceux évoqués plus haut, mais auxquels ont droit cette fois des personnes qui ne sont pas auteurs de l’œuvre. Elles ont toutefois un lien avéré avec elle : ce sont des parties prenantes, sans lesquelles l’œuvre n’aurait pu voir le jour ou n’aurait pas eu le même impact.
Autrement dit : les artistes-interprètes, qui jouent, représentent ou exécutent une œuvre (des chanteurs, des musiciens, des danseurs…) ; les producteurs (CD OU DVD) ; les entreprises de communication audiovisuelle ; les producteurs de bases de données… Les muses ou amis hautement inspirants peuvent-ils bénéficier des droits voisins, hélas non, à moins d’avoir concrètement participé : parlez-en avant d’être millionnaires afin d’éviter de vous fâcher pour quelques sous.
5 – Pour en savoir plus :
- Un bon récap’ avec le ministère de l’économie et des finances
- Il existe un site dédié au conseil en propriété industrielle et même un annuaire des conseils !
- Le dépôt de brevets en France en chiffres
- La différence entre copyright et droit d’auteur
- Pour ceux qui visent l’international, vous n’êtes pas seul : l‘Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) est une organisation internationale qui veille à ce que les droits des créateurs soient protégés dans le monde entier.
Un article rédigé par Laëtitia Cognie pour Wojo, business humanizer et amicalement relu par Elodie Herbel, Cabinet Herbel avocats.
Crédit photo à la Une : Photo by James Pond sur Unsplash.