Savez-vous ce qu’est une Jeune entreprise innovante ou JEI ? Vous êtes créateur, dirigeant ou salarié de l’une de ces 10.000 start-up qui existent en France ? Vous fouinez sur le Web à la recherche d’une bonne idée pour votre entreprise ?
Vous êtes peut-être tombé sur le bon article : aujourd’hui, et sans même avoir besoin d’un doctorat en comptabilité, nous allons parler d’exonération fiscale pour les jeunes entreprises innovantes avec le statut JEI : le genre de découverte qui pourrait bien changer la vie de votre entreprise, parole d’entrepreneur.
Statut JEI : qu’est-ce que ça veut dire ?
Initié par la loi de finances de 2004, le statut de Jeune Entreprise Innovante permet actuellement à 3 000 PME et TPE françaises (dont la mienne) de profiter d’exonérations fiscales et sociales sur leurs charges. Ceci afin de financer leurs projets de R&D (Recherche et Développement).
En
d’autres termes, bien loin des aides et subventions payées a
posteriori par des organismes tels que la BPI, le FSE ou la CDC et
qu’on (dés)espère voir arriver tous les matins sur son compte professionnel. Avec
le statut JEI on n’espère plus : on exonère ! Ce n’est plus de l’argent qui
doit rentrer, mais c’est de l’argent qui ne sort pas, et ça vous change la vie.
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De quelles exonérations parle-t-on concrètement ?
Premièrement, de l’exonération des cotisations sociales patronales payées à l’URSSAF sur les salaires des collaborateurs dont l’activité contribue à votre R&D (chercheurs, product owners, développeurs, etc.). Concrètement, si habituellement le coût employeur pour un salarié dont le revenu brut annuel est fixé à 36 K€ est approximativement de 49 K€, avec un statut JEI, ce coût employeur s’abaisse à 42 K€, soit une économie directe de 7 K€. Additionnez ces économies de charges sur l’ensemble des salariés contribuant à la R&D de votre entreprise, et vous aurez sans doute de quoi embaucher de nouveaux talents.
Deuxièmement, de l’exonération d’impôts sur les bénéfices si vous avez la chance d’être déjà passé breakeven. Cette année est votre premier exercice bénéficiaire ? Pour vous récompenser, vous êtes exonéré à 100% d’impôts sur les bénéfices. Vous serez ensuite exonéré à hauteur de 50% pour tous vos prochains exercices bénéficiaires, tant que vous serez sous l’égide du statut JEI. Encore une fois, faites le calcul de vos économies, vous aurez de quoi financer de nouveaux projets.
Troisièmement, de l’exonération de la Contribution économique territoriale (CET) et donc de la CVEA (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) et de la CFE (cotisation foncière des entreprises) ainsi que de la taxe foncière. Mais n’entrons point trop dans les détails, les concernés se reconnaitront.
Cependant attention, la somme de cette exonération d’impôts sur les bénéfices, de la CET et de la taxe foncière ne peut excéder les 200 K€ sur 3 ans (ce qui vous laisse tout de même une marge raisonnable).
C’est bien beau tout ça, mais comment avoir le statut JEI ?
Avec de tels avantages, vous vous doutez bien qu’avoir un statut JEI ne se fait pas sur un claquement de doigts. Néanmoins, rien d’insurmontable non plus.
Il faut dans un premier temps vérifier que votre entreprise remplisse les cinq conditions suivantes :
- Être jeune : l’entreprise doit être âgée de moins de 8 ans (vérifiez la date d’immatriculation au RCS) ;
- Être PME : le nombre de salariés ne doit pas dépasser 250 et le chiffre d’affaires doit être inférieur à 50 M€ ;
- Être from scratch : l’entreprise ne doit pas être le fruit d’une restructuration, d’une concentration ou d’une reprise d’activité ;
- Être indépendante : le capital social doit être détenu à plus de 50% soit par des personnes physiques, des associations ou fondations reconnues d’utilité publique à caractère scientifique, des établissements de recherche et d’enseignement, des sociétés d’investissement (dans le cas où il n’y a pas de lien de dépendance directe), des JEI ou une autre PME dont le capital social est lui-même détenu à 50% par des personnes physiques ;
- Être innovante : les dépenses de R&D (dépenses de personnel, amortissements du matériel concerné, dépenses de sous-traitance à des organismes publics habilités ou privés agréés, frais de propriétés intellectuelles, frais de veille technologique, etc.) représentent au moins 15% des charges annuelles de l’entreprise.
Si la grande majorité des 10.000 start-up françaises remplissent les quatre premières conditions, ne nous mentons pas, la cinquième est la plus rare et la plus complexe à justifier.
En réalité, avoir une activité innovante ne suffit pas pour justifier d’un statut JEI : il faut bel et bien enrichir l’état de l’art des connaissances scientifiques et/ou techniques actuelles. En effet, si une activité d’innovation tend « uniquement » à dépasser d’un point de vue technique ou ergonomique les performances de produits déjà existants sur le marché, une activité de R&D, elle, doit aller bien au-delà.
Une activité de R&D demeure une démarche scientifique dont l’objectif est d’acquérir des connaissances nouvelles puis de mettre en application ces connaissances afin de permettre à l’entreprise d’atteindre un objectif prédéterminé. C’est pourquoi on divise traditionnellement la R&D en trois activités distinctes :
- la recherche fondamentale qui déterminera les patterns et schémas explicatifs ;
- la recherche appliquée qui produira les modèles probatoires ;
- le développement expérimental qui testera les éléments en vue de leur mise en production ou de leur amélioration.
En résumé, votre projet de R&D doit avoir pour ambition de faire progresser les connaissances actuelles mondiales de votre secteur. J’ai bien dit « pour ambition » puisqu’il n’y a pas une obligation de rendu pour le JEI (tout le monde n’arrive pas à sauver le monde) mais une obligation d’effort (vous devez par contre quand même essayer).
Quelles sont les démarches pour avoir un statut JEI ?
Vous pensez remplir ces critères ? Dans ce cas, c’est parti pour la paperasse. Pour ce faire, vous devez déposer un dossier en recommandé avec accusé de réception auprès de la Direction des services fiscaux dont vous dépendez. Dans le cas où l’administration ne vous répond pas dans les 3 mois qui suivent l’envoi du dossier, votre entreprise obtient légalement le statut JEI jusqu’à la date de son neuvième anniversaire.
Si sur le papier cette démarche paraît simple, ne soyez cependant pas trop rêveur : avec de tels enjeux fiscaux, le régulateur contrôlera forcément votre demande. Un inspecteur des impôts pourrait bien vous contacter quelques jours afin la fin de l’échéance : ses questions seront nettes et chirurgicales. Si votre dossier n’est pas financièrement solide, scientifiquement envisageable et structurellement réalisable, il ne fait aucun doute qu’il sera refusé.
N’hésitez donc pas à vous faire accompagner par des cabinets d’experts ou à discuter avec des entrepreneurs ayant été confrontés à ces problématiques pour ne pas tomber dans certains pièges, sachant qu’une fois que votre demande a été refusée, il est difficile de revenir en arrière.
Le dossier vous prendra du temps, beaucoup de temps, mais le jeu en vaut la chandelle d’autant plus que le statut JEI est la porte ouverte à bien d’autres avantages tel que le CIR (crédit d’impôt recherche)…
Modèle de dossier JEI : https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/7237-PGP